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jeudi 1 octobre 2009

JACKIE CHAN


Les films que Jackie Chan a tourné avec Lo Wei constituent pour beaucoup le point noir de sa filmographie. Souvent mal perçus, ils ont donné lieu à toutes sortes de railleries chez les fans de la star (et du film d'arts martiaux) et n'ont jamais eu pratiquement droit à un avis objectif car ils ont a tendance à être jugés d'un seul bloc : La période Loi Wei. Si le réalisateur manque indéniablement de créativité, ce n'est pas le cas de sa jeune star fougueuse. Tant bien que mal, Jackie Chan tentera de faire son possible pour dynamiser des films qui ne sont, pour la plupart, que des recyclages des succès du moment. En résultent des films parfois mineurs parfois divertissants, certains étant même des petites réussites totalement à mettre au crédit de la star.

Avec ce dossier, nous allons nous intéresser à cette période de l'acteur, trop souvent tombée dans l'oubli et qui fut sujet à de fausses informations (Non, Jackie Chan n'a pas joué que des vengeurs crispés dans les productions Lo Wei). Nous allons aborder ces productions sous trois angles : les films eux-mêmes, les scènes d'action qui seront pour l'acteur un incroyable champ d'expérimentation et l'apport de ces productions à la star pour sa carrière future.

Petite précision avant de commencer : pour ce dossier, nous mettrons volontairement de côté La hyène intrépide (Fearless Hyena), première réalisation de Jackie Chan mise en place après ses deux succès avec Yuen Woo Ping : Le Chinois se déchaîne (Snake in the Eagle's Shadow) et Le maître Chinois (Drunken Master). Il est évident que ce film s'impose comme le meilleur (de loin) de Jackie Chan sous sa période Lo Wei. Mais il n'a pas été fait dans les mêmes conditions que les autres métrages, l'acteur ayant le contrôle quasi-total de l'œuvre. De ce fait, il tiendra une place mineure dans ce dossier car nous préférons nous intéresser aux autres films où l'acteur devait s'accorder tant bien que mal avec Lo Wei.

Réalisateur à succès au tout début des années 70, Lo Wei n'arrive plus par la suite à se renouveler et à faire face aux demandes du cinéma hongkongais alors en pleine mutation. A partir de 1974, l'ancien « millionnaire director » (son surnom prestigieux durant son heure de gloire) ne fait plus qu'enchaîner les bides au box-office et pour reprendre un terme branché, devient rapidement un « Has Been » plus du tout dans le coup. Son association avec la Golden Harvest rompue, il part pour l'île de Taiwan, refuge de ceux qui n'ont plus de succès à Hong Kong et incroyable royaume de la copie des triomphes du moment. Il y fonde le petit studio de production Lo Wei Motion Picture.


Après avoir cherché un premier rôle pour ses films, il jette son dévolue sur Jackie Chan d'après les conseils de Willie Chan, chef de la publicité de la Lo Wei Motion Picture. Willie Chan aura offert beaucoup de support moral à Jackie Chan durant ces années difficiles et l'aura sûrement aidé à sortir des griffes de Lo Wei lors du litige entre les deux hommes. Jackie Chan n'est pas un inconnu dans le milieu cinématographique et en particulier pour Lo Wei car il a déjà été un cascadeur, figurant et parfois acteur dans ses films. Entre autres, c'est lui qui doublait le méchant de La fureur de vaincre (Fist of Fury) lors de sa chute finale occasionnée par Bruce Lee. Lo Wei est sûr de tenir une nouvelle star du film d'arts martiaux. D'ailleurs le réalisateur rebaptise Jackie Chan en le nommant Sing Lung (« Devenir le Dragon »), et lui fait subir une opération pour lui agrandir les yeux afin de lui donné un look de vedette plus présentable.

Les deux hommes signent un contrat en 1976 et sortent un premier film : La nouvelle fureur de vaincre (New fist of Fury). Voulant donner une suite à son film, Lo Wei ne choisit pas la facilité pour la première production de son studio. Succéder à Bruce Lee étant impossible. Il place son intrigue à Taiwan (normal) et raconte la fuite de Nora Miao et quelques autres disciples de l'institut Jing Wu chez des amis, propriétaires d'un institut martial qui va être aussi l'objet des convoitises Japonaises. Pour faire face à l'ennemi, ils seront aidés par un jeune vagabond (Jackie Chan). Guère original, le film ne cesse d'accumuler les défauts : rythme lent, réalisation mollassonne, décors pauvres, interprétation aléatoire.

Pour sa première tête d'affiche chez Lo Wei, Jackie Chan se montre quasi inexistant. Le constat est sans appel dans la scène où il avance vers Nora Miao et que celle-ci repense à son amoureux, Bruce Lee, revoyant son image dans sa tête. Le passage du portrait de Bruce Lee à celui de Jackie Chan est défavorable au jeune acteur. Il passe une grosse partie du film en ne sachant pas se battre ou en étant blessé. Etant tout jeune acteur, Lo Wei n'a sûrement pas voulu tout miser sur Jackie Chan pour son premier film en tant que vedette et de ce fait, l'intrigue se concentre bien souvent sur Nora Miao et Han Ying Chieh, tous deux bien fatigués semblent-il vu l'inconsistance de leurs jeux. Quant au traitement infligé aux Japonais, c'est du vu et revu cent fois et le bad guy du film interprété par Chan Sing se montre plus caricatural que terrifiant. La nouvelle fureur de vaincre est certainement le plus mauvais film de Jackie Chan (avec Magnificent Bodyguards et Killer Meteors) lors de son association avec Lo Wei. Échec au box-office, qui sera le premier d'une longue série, il n'empêchera pourtant pas la mise en chantier d'autres films avec Jackie Chan en vedette.

Le Kung Fu Pian ne semblant pas convenir pour sa jeune star, Lo Wei décide de le faire jouer dans une série de Wu Xia Pian. Les deux premiers en tant que vedette et le troisième comme méchant. Pour ces films, ils s'inspirent des romans de Gu Long, romancier célèbre dont les luxueuses adaptions par le réalisateur vedette Chu Yuan pour la Shaw Brothers font fureur à l'époque. Mais là où le spécialiste du Wu Xia onirique réussira à piocher des parties des romans de l'écrivain et les retranscrire à l'écran avec talent et cohérence, Lo Wei lui ne retrouvera jamais le charme et la grâce des écrits de Gu Long. L'univers qu'il dépeint n'est pas crédible, d'autant plus que les lieux naturels de l'île nationaliste sont moins efficaces que les décors du studio Shaw pour conter les histoires de Gu Long. Pire encore, Jackie Chan se montre encore moins à l'aise en héros de Wu Xia que de Kung Fu Pian. Totalement figé, l'acteur n'est absolument pas convaincant.

Dans Magnificent Bodyguards, il joue une sorte de garde du corps (comme son titre l'indique) qui doit escorter, avec d'autres hommes, un homme malade dans une région à risques. Film complètement raté qui pille même la musique de Star Wars, Magnificent Bodyguards ne connaîtra jamais une sortie en France.

Le vengeur (To kill with Intrigue), bien que lui aussi en partie raté, se montre plus divertissant. Après que sa famille fut massacrée par une femme (Hsu Feng) et son clan, Jackie Chan se rend compte que cet acte fut réalisé grâce à la complicité de son meilleur ami qui lui a également volé sa promise pour l'épouser. Toujours aussi peu à sa place dans son rôle de chevalier mélancolique, l'acteur à pour partenaire la glaciale mais intensément charismatique Hsu Feng, l'égérie du cinéaste King Hu. Habituée aux Wu Xia, la comédienne domine le reste du casting dans un rôle de femme manipulatrice et marquée à jamais par la gente masculine. Un personnage intéressant, qui si il n'est pas assez traité comme il se doit, demeure la principale attraction de l'histoire. Le vengeur se veut tragique et noir. Plombée par des acteurs trop caricaturaux, cette production se montre souvent risible et n'est encore une fois qu'un film mineur.


Une des constantes des productions Lo Wei est d'y voir des stars sur le déclin : Hsu Feng, Chan Sing, Kam Kong…. Pour son prochain projet, Lo Wei refait équipe avec l'acteur Jimmy Wang Yu, lui aussi condamné à errer à Taiwan en quête d'une gloire passée. On se souvient de la collaboration entre les deux hommes à la Golden Harvest : Un homme nommé tigre (A Man called Tiger), Le bras vengeur de Wang Yu (Seaman no. 7) et Le dragon tatoué (The Tattooed Dragon). Trois sympathiques films de kung fu où les deux hommes montraient encore un certain talent, un amour infini pour la série B. Rien de tout ça dans Killer Meteors, Wu Xia encore une fois bancal. Une crapule (Jackie Chan) engage un homme connu sous le nom de « killer Meteors » (Wang Yu) pour tuer sa femme. Bien entendu, tout cela n'est qu'un traquenard. Qu'il incarne le héros ou le méchant, Jackie Chan n'est décidément pas dans son élément dans un Wu Xia. Jimmy Wang Yu s'en tire mieux, l'acteur ayant une grande expérience dans le domaine (voir sa période à la Shaw Brothers). Mais l'homme ne peut pas tirer par le haut une production fauchée avec des acteurs mauvais à lui tout seul. Comme Magnificent Bodyguards, Killer Meteors n'a jamais eu droit à une sortie Française.

Après ces trois échecs, Lo Wei va se désintéresser peu à peu de son jeune poulain en ne réalisant pas lui-même ses trois productions suivantes. Ce choix va dessiner peu à peu le futur de la star. En effet, le réalisateur cède sa caméra à Chan Chi Hwa, assistant totalement différent de Lo Wei. Il sera véritablement le premier à comprendre que Jackie Chan ne peut s'exprimer véritablement que si il joue dans des films adaptés à son style.

source : http://www.hkcinemagic.com

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