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vendredi 17 février 2012

Les dossiers secrets du MI5 contre Charlie Chaplin

1952, en pleine guerre froide avec l'Union soviétique, soudés derrière le sénateur Joseph MacCarthy, les Etats-Unis traquent sans relâche les "traîtres" communistes. La chasse aux sorcières, initiée deux ans plus tôt et qui durera jusqu'en 1954, vise tous les milieux sans discrimination.

Déjà mondialement connu pour ses films Les Temps modernes (1936) et Le dictateur (1940), l'acteur et réalisateur britannique Charlie Chaplin est dans le viseur des Maccarthystes. Pour les services de renseignement intérieur américains, le FBI, il est "un Bolchévique de salon d'Hollywood". L'acteur est soupçonné d'avoir fait un don dissimulé au Parti communiste américain en 1923 et d'avoir maintenu ses activités communistes par la suite. Plus de 2 000 pages sont réunies sur l'acteur comique.

En 1952, le FBI demande à son homologue britannique, le MI5, de les aider dans la collecte d'informations pouvant corroborer leurs soupçons. Le FBI veut savoir si Chaplin rencontre des "personnes haut placées" à Londres et développe des liens avec le parti communiste. Les services s'intéressent aussi tout particulièrement au lieu de naissance de l'acteur et cherche à vérifier si son vrai nom est Israel Thornstein, comme ils le supposent.

Le dossier ouvert en 1952 par le MI5 sur Charlie Chaplin - numéro PF710549-, rapporte le Guardian, a été divulgué vendredi par les Archives nationales britanniques (en consultation payante sur leur site). Plusieurs éléments semblent corroborer les soupçons américains. "Chaplin a financé des organisations communistes... Il a été impliqué dans des affaires de paternité et d'avortement", rapporte alors un officier de liaison du MI5 à Washington en octobre 1952. Les services britanniques rapportent également que dix ans plus tôt, Charlie Chaplin a déclaré devant la branche de Los Angeles du Conseil national du l'amitié sovieto-américaine : "Il y a du bon dans le communisme. Nous pouvons utiliser ce qui est bon et mettre de côté le mauvais"


Les dernières minutes du film Le dictateur (1940)

Mais, pour le MI5, il s'agit moins de mettre en lumière les sympathies communistes de la star que de déterminer si il présente un risque pour la sécurité. Et, sur ce point, le verdict est sans appel : "Nous ne trouvons aucune trace de cet homme dans nos dossiers et nous ne voyons aucun élément concret permettant de le présenter comme un risque pour la sécurité", conclut à l'époque le directeur du MI5, Sir Percy Sillitoe. Sur ses sympathies communistes présumées, le MI5 est même nuancé : "Il est possible que Chaplin soit un sympathisant communiste, mais au regard des informations dont nous disposons, il ne semble pas être davantage qu'un 'progressiste' ou un 'radical'". Pour les services de renseignement britannique, le nom de la célébrité a même pu être exploité dans les intérêts du communisme pour le présenter comme "l'une des victimes du Maccarthysme".

Les autorités américaines n'en démordront toutefois pas. En 1953, Charlie Chaplin se voit notifier une interdiction d'entrée sur le territoire américain. Une décision contre laquelle il ne fera pas appel, bien que niant être communiste. "Je suis la victime de mensonges et d'une propagande vicieuse", dira l'acteur, décidé à s'installer en Suisse, où il mourra le jour de Noël 1977.


Londres ? Paris ? Ailleurs ? Le mystère entourant la naissance de Charlie Chaplin reste entier. Le MI5, les services secretes britanniques, qui enquêtaient dans les années 50 sur les sympathies communistes prêtées à Chaplin, ont en effet découvert qu'il n'y avait aucune trace de la naissance du cinéaste à Londres.

Les renseignements britanniques avaient été chargés en 1952 par l'ambassade américaine d'enquêter sur le cinéaste, accusé d'avoir fait un don caché au parti communiste américain en 1923 et de continuer à entretenir des liens avec le PC.

Ils n'ont trouvé aucun certificat de naissance attestant que la star du muet était née à Londres en 1889, comme on le croyait, dans un quartier pauvre de la capitale, avant d'émigrer vers les Etats-Unis en 1910. Il «n'y a pas de trace dans nos archives de Charlie Chaplin» et «pas de preuve non plus que le vrai nom de Chaplin soit Israel Thornstein», patronyme d'un juif russe suggéré par les Etats-Unis, écrivent les services secrets de l'époque.

Chaplin ne serait pas non plus né en France

Les services secrets britanniques ont également écarté l'idée que Charles Spencer, de son nom de scène Charlie Chaplin, ait pu naître en France, comme cela avait été aussi avancé. Mais l'absence de certificat de naissance de la star n'a pas troublé outre mesure le patron de la branche anti-subversion du MI5, John Marriott: «Il est curieux que nous ne trouvions aucune archive sur la naissance de Chaplin, mais je considère que cela n'a pas grande importance du point de vue de la sécurité», explique-t-il alors.

En 1953, Chaplin, venu faire la promotion d'un de ses films à Londres, se voit interdire tout retour en Amérique, en proie à la fièvre anti-soviétique du MacCarthysme, malgré ses dénégations sur ses sympathies communistes. Cinq ans plus tard, les services britanniques concluaient qu'il n'y avait pas d'éléments permettant de considérer que Chaplin constituait un «risque pour la sécurité nationale». A leurs yeux, c'était un «progressiste» ou un «radical», plutôt qu'un communiste, même si le nom de celui qui était considéré comme l'une des victimes du McCarthysme» a été utilisé pour servir les intérêts du communisme.

LeParisien.fr

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