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jeudi 10 septembre 2009

LES TONTONS

Sorti sur nos écrans le 27 novembre 1963, Les Tontons flingueurs fait aujourd'hui son grand retour dans une version entièrement restaurée en numérique haute-définition. Une initiative signée Gaumont qui, chaque mois, nous invite à redécouvrir un grand classique de notre patrimoine dans des conditions tout à fait semblables.Réalisé par Georges Lautner, le film se dote d'un casting à la limite de la perfection, de Lino Ventura à Bernard Blier, en passant par Jean Lefèbvre, Francis Blanche, Claude Rich, Venantino Venantini et Robert Dalban. Un véritable prestige, agrémenté de dialogues irrésistibles conçus par Michel Audiard et d'une bande originale signée Michel Magne. Séquence nostalgie...

Sur son lit de mort, le Mexicain fait promettre à son ami d'enfance, Fernand Naudin, de veiller sur ses intérêts et sa fille Patricia. Fernand découvre alors qu'il se trouve à la tête d'affaires louches dont les anciens dirigeants entendent bien s'emparer. Mais, flanqué d'un curieux notaire et d'un garde du corps, Fernand impose d'emblée sa loi. Cependant, le belle Patricia lui réserve quelques surprises !

Ce que l'on retient avant tout de cette oeuvre, ce sont ses répliques, cultes pour la plupart.


« Non mais t'as déjà vu ça ? En pleine paix, y chante et pis crac, un bourre-pif, mais il est complètement fou, ce mec ! Mais moi les dingues j'les soigne, j'm'en vais lui faire une ordonnance, et une sévère, j'vais lui montrer qui c'est, Raoul. Aux quatre coins d'Paris qu'on va l'retrouver éparpillé par petits bouts façon puzzle... Moi quand on m'en fait trop j'correctionne plus, j'dynamite... J'disperse... Et j'ventile... »

Audiard en était alors au milieu de sa carrière, un an seulement après avoir travaillé sur Un singe en hiver et Le gentleman d'Epsom (pour ne citer que ceux-là). Par ailleurs, il connaît avec minutie les principaux comédiens du film. Il sait parfaitement quel mot donner à chacun. En revanche, il s'agit là de sa toute première collaboration avec le cinéaste Georges Lautner. Celui-ci en est pourtant à son huitième film (dont la fameuse série des Monocles, avec Paul Meurisse). Quoi qu'il en soit, et suite à cette incroyable collaboration, les deux hommes ne se quitteront plus (ou presque), Audiard étant rattaché aux dialogues (mais aussi parfois au script) de différents long-métrages, tels que Le Pacha, Est-ce bien raisonnable ?, Le professionnel, Flic ou voyou ou bien encore Le Guignolo.


Les Tontons flingueurs demeurera pourtant l'une de leur plus grande réussite. Mais il est difficile encore aujourd'hui d'en expliquer la raison. Le succès du film repose sur une alchimie presque miraculeuse, un état de grâce, alliant comédiens venant d'horizons divers, plongés au beau milieu d'un univers complètement débridé. Une première pour l'époque, que rien ne laissait présager. Rappelons qu'à l'origine, l'oeuvre est une adaptation d'un roman d'Albert Simonin (également co-scénariste du long-métrage), Grisbi or not grisbi, lequel faisait suite à deux autres livres, également portés à l'écran, Touchez pas au grisbi, et Le cave se rebiffe. Le cinéma ne tînt pas compte du lien réunissant ces trois ouvrages, si bien que Jean Gabin lui-même, originellement pressenti dans le rôle de Fernand Naudin, fut finalement remplacé par Lino Ventura (choix largement appuyé par Lautner auprès de la production).

Une fois le casting choisi, le réalisateur attacha une extrême importance à la mise en scène. Les tontons flingueurs est loin d'être une comédie comme les autres. A l'instar d'un Gérard Oury qui, quelques années plus tard, fera de même pour Le Corniaud et La grande vadrouille, l'homme tient à donner un sens bien spécifique à ses images. En hommage au texte dont il s'inspire, il donna donc au film une lumière digne des films noirs tournés dans les années 50. L'humour viendra alors s'ajouter en plus, transformant le résultat en un formidable pastiche. Ventura, qui évoquait des doutes quant à son potentiel d'acteur comique, dut se faire une raison car il se révéla tout simplement irrésistible face au « couple », non moins réussi, constitué de Blier et de Lefèbvre. Si l'on devait ne retenir qu'une scène du film, ce serait sans nul doute celle de la cuisine (à deux doigts d'être coupée du montage final, car jugée inutile par Audiard à l'époque). Le jeu des comédiens est d'une précision sans faille et les dialogues d'Audiard une véritable partition musicale.

A sa sortie, Les tontons flingueurs ne rencontra pas un immense succès (près de 450 000 spectateurs en six mois sur Paris et sa périphérie), accablé par des critiques sans scrupule et finalement peu visionnaires (Henry Chapier écrira « Vous pavoisez haut... mais vous visez bas. »). Heureusement, le statut du film évolua avec le temps, grâce à ses nombreuses diffusions télévisées ainsi qu'à son édition DVD parue en 2002. Il s'agit aujourd'hui d'une oeuvre culte, pour ainsi dire intouchable. Georges Lautner en reste le premier surpris : « Pourquoi ce film et pas un autre ? Quand nous avons tourné, nous avions tous envie de rigoler. Finalement, c'est peut-être ça l'explication : la déconnante vieillit mieux que le tragique. » Nous ajouterons : « Tant mieux. »


A peine un an plus tard, la fine équipe, ou du moins, une majeure partie, de Lautner à Ventura, en passant par Blier, Blanche, le producteur Alain Poiré, et bien évidemment, l'incontournable dialoguiste Michel Audiard, se réunira pour une nouvelle aventure cinématographique, intitulée Les Barbouzes. Le ton restera sensiblement le même, avant de finir dans la parodie la plus totale, en 1966, pour Ne nous fâchons pas. Suite à cet ultime long-métrage, Lino Ventura refusa de signer pour un « nouvel » épisode, trouvant que l'humour parodique prenait décidément trop d'importance. Lautner n'eut donc plus jamais l'occasion de travailler avec lui.

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