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lundi 18 mai 2009

LE PRISONNIER, transcender le système


On n'a pas besoin de tout comprendre pour apprécier "le prisonnier" mais j'ai quand même cherché sur le net pour essayer d'avoir toutes les réponses à mes questions... Voici la suite :

II) Transcender le système : la victoire

La portée philosophique de cette série - alors incomprise dans les années 60 à tel point que le réalisateur avait dû fuir en Suisse pour échapper aux téléspectateurs insatisfaits de la réponse à la fameuse question : qui est le numéro 1 ? - est aujourd'hui d'une étonnante modernité. D'une part, la dénonciation du totalitarisme est manifeste étant donné que la série fut réalisée 21 ans après la seconde guerre mondiale. D'autre part, l'allégorie de l'homme oppressé de plus en plus par les réalia quotidiennes, qu'il essaye de fuir, demeure flagrante. Le Prisonnier évoque une forme de psychose schizophrénique car l'individu lutte contre le système tout en essayant d'y échapper : " "Qu'est-ce que c'est ?" et "Qui est-ce ?" sont les deux grandes questions de la peur. La simple formulation de telles questions implique un tremblement du réel annonçant tous les fantasmes du double, tous les symptômes de la dissociation caractéristique de la schizophrénie : soit de cette décomposition de l'âme par laquelle Maupassant définit justement la peur. "[1] [11] Transcender l'horreur pour ne pas l'affronter manifeste une évasion quasi spirituelle. Mais c'est aussi un véritable éloge de la fuite. A la fin de la série, le numéro 6 s'évade pour rentrer chez lui comme toute personne qui, ayant fini sa journée de travaille, retrouve son logement douillet pour se ressourcer.


Si cette réalisation télévisée est encore aujourd'hui considérée comme étrange, atypique par rapport à leurs concurrentes plus ludiques telles que Amicalement Votre, ou bien Chapeau melon et bottes de cuir, elle s'adresse à une certaine maturité d'esprit. Cette série, " comme toute ouvre forte née de la puissance créative d'un seul homme, n'est faite que de références et de réminiscences : agencées, réorganisées, transfigurées selon une alchimie mystérieuse. "[1] [12] A la première lecture, le spectateur peut entrevoir une farce ubuesque dans laquelle les personnages déambulent sans raison apparente : la fanfare, les déguisements préfigurant les costumes d'Orange mécanique, et le classique : " bonjour chez vous ! "[1] [13] , l'illustrent parfaitement.


En réalité, le prisonnier veut s'échapper physiquement et moralement de " ce pays d'où l'on ne revient jamais ". Il y a d'abord les tentatives physiques d'évasion : par la mer, l'air et la route. Mais la fuite finale se jouera sur la complexité des rapports humains. Patrick Mc Goohan résiste aux pièges des différents adversaires souvent impersonnels, mais il apprend à les cerner et finalement prend l'initiative de l'attaque. Derrière son aspect monolithique, le numéro 6 déstabilise ses hôtes aux comportements plus poétiques que logiques. De même, il ne se laisse pas aller devant les personnes du " beau sexe " : certaines, très belles, sont envoyées par le démon numéro 1. Ressemblant à des succubes joyeux, ces femmes sont le reflet du désir narcissique du numéro 6.


Mais il lutte également contre les persécutions verbales bien ciblées des différents numéros 2. Il pervertit tous les interrogatoires, échappe au détecteur de mensonges. L'ensemble prépare la victoire, sa libération, néanmoins son jugement dernier a lieu curieusement à la sortie de son incarcération et non à l'entrée.


Sorte de subversion judiciaire qui nous interroge sur le sens de la série et peut-être plus globalement sur la vie et son caractère parfois absurde. Il s'agit du thème de la culpabilité que nous pourrions rapprocher effectivement du Procès de Kafka : aucun des deux protagonistes ne sait pourquoi il est inculpé. Joseph K. cherche à comprendre sa culpabilité tandis que le numéro 6 veut s'évader. Ce dernier reste dans le refus pur et dur : c'est le triomphe de l'individualisme. La question de la faute ne se pose donc pas : " le héros de la série classique a également ceci de particulier qu'il ne subit aucune évolution au fil des épisodes, donnant véritablement l'impression qu'il traverse les pires péripéties sans jamais que celles-ci ne l'affectent, tant sa personnalité est forte. "[1] [14] Dans Le Prisonnier, on connaît la conséquence de la démission mais pas la raison. Son action inconnue le conduit à l'enfermement ce qui constitue, dès le premier épisode, sa force alors que l'inculpation n'est pas définie. Sa démission ne semble pas être l'unique motif de son isolement. Il existe une certaine gratuité déconcertante.


Tous les espaces de la série sont des prisons, même la digression de l'épisode numéro 14, tourné comme un western, le montre : Patrick Mc Goohan devenu shérif se retrouve à plusieurs reprises derrières les barreaux. Conçue comme une série dont chaque épisode semble être une histoire autonome, il est souhaitable de suivre l'ordre des dix-sept feuilletons pour reconstruire le puzzle de cette machination. Chaque aventure en dit un peu plus mais pas trop. Il faut vraiment attendre la fin pour saisir qu'il n'y a rien à comprendre : " Envisagée sou cet aspect, la création est bien une fuite de la vie quotidienne, une fuite des réalités sociales, des échelles hiérarchiques, une fuite dans l'imaginaire. "[1] [15] Métaphoriquement, la victoire de notre propre évasion demeure la libre interprétation de l'énigme. Le numéro 6 est bien le numéro 1, mais ce dernier reste une boîte de pandore qui aveugle et qui rend fou. On sort d'un univers absurde pour rencontrer la vérité ou les vérités. Comme à la fin d'Avalon, le spectateur quitte un monde de jeu virtuel pour retourner à la réalité. D'ailleurs, celle-ci demeure le dernier niveau du jeu vidéo dans le film de Mamoru Oshii. Il faut reconstruire le monde qui nous est offert. Le numéro 1 représente aussi le téléspectateur, celui qui voit tout sans forcément tout comprendre. Cette fois-ci le numéro 1 n'a pas un visage de méchant comme dans les James Bond ; de surcroît, rien n'est expliqué

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