Michel Galabru sera ce soir à Saint Benoit (86) pour jouer la pièce de Marcel PAGNOL : La femme du boulanger. Inutile de vous dire que je serai dans la salle ce soir !
Pendant deux heures, il incarne Aimable Castanier, nouveau boulanger d´un village de Provence, brutalement quitté par sa femme. Tant que la belle Aurélie (Dominique Régnier) ne reviendra pas, le boulanger ne fera plus de pain. Et c´est tout le village qui s´en mêle.
En 1985, lorsque Savary l’a mise en scène, ça a été un événement, puisqu’aucune adaptation au théâtre n’avait encore été faite. Mais quelques années plus tôt, j’avais eu l’honneur d’être convoqué par M. Pagnol, chez lui, avenue Foch. Il m’a demandé, à mon grand ébahissement, de jouer “La femme du boulanger” au théâtre. Je lui avais refusé : j’avais dans l’oreille la musique extraordinaire de Raimu. J’ai répondu à M. Pagnol : vous avez travaillé avec Raimu, vous allez être déçu, on ne refait pas un Vermeer. Il avait été ébranlé, mais avait dit : "Je vous comprends".
Pourquoi alors avoir accepté la sollicitation de Jérôme Savary, dix ans plus tard ?
On m’avait dit que Savary me cherchait pour l’adaptation. Mais j’ai dit : « Si j’ai refusé à Pagnol, pourquoi j’accepterai Savary ? » Et puis j’ai finalement accepté un repas avec lui. De Funès m’avait pourtant prévenu de ne pas accepter une bouffe. A la fin du repas, après avoir été autant gâté, si je n’avais pas signé, j’aurais été un ingrat.
Avec toujours en tête l’inévitable comparaison avec Raimu ?
Bien sûr, j’étais hanté par la peur et la panique. Raimu, c’était la perfection même. Mais j’étais poussé par la nécessité. J’avais signé, il fallait bien que je m’exécute. Ceci dit, quand un pianiste même modeste joue du Mozart ou du Beethoven, ça reste du Mozart ou du Beethoven. Et là, il y avait quand même les mots de Pagnol : son style est simple, c’est la marque des plus grands. Vous pouvez toujours éblouir les gens par des mots nouveaux, des figures de style : mais un type qui, par tant de simplicité, éveille en vous la beauté et l’humanité, c’est rare.
25 ans après l’avoir joué pour la 1re fois, quelle est la différence dans la façon d’aborder le rôle du boulanger ?
C’est très simple : la différence, c’est l’âge. Lorsque la pièce a été remontée l’an dernier, j’ai dit, attention, vous allez voir un grand-père qui retrouve sa petite-fille, et pas le boulanger avec sa femme. Mais je regrette qu’on ait perdu quelque chose qui n’existe plus : à la Comédie Française, que j’ai fréquentée, des gens très âgés jouaient des jeunes, et mieux que des jeunes. Albert Lambert jouait le Cid à 75 ans ; Berthe Bovy, à 50 ans, jouait Poil de carotte, un personnage de 14 ans. Et Georges Leroy, à ce même âge, jouait On ne badine pas avec l’amour : eh bien je n’ai jamais entendu un jeune premier aussi bien le jouer.
Vous évoquiez la simplicité de Pagnol. Le spectacle proposé ce soir se contente-t-il de la valeur de ce texte ?
Nous sommes à une époque où les metteurs en scène réécrivent les textes. Il existe de bons metteurs en scène : mais beaucoup le sont car ils ont échoué comme acteur ou comme auteur. Mettre en scène, c’est placer les acteurs, voir quand ils dérivent, quand le jeu n’est pas juste. C’est un chef d’orchestre. Mais je ne vous raconte pas les conneries qu’on m’a fait faire : j’ai joué Dom Juan, on m’a habillé avec un panama et un cigare... Lorsque Savary a mis en scène Le bourgeois gentilhomme, il tarabiscote la pièce, il la réécrit, mais de façon cocasse. A un moment, on voit le cul de la soubrette : je ne sais pas bien pourquoi, même si ça n’est pas désagréable. Mais pour La femme du boulanger, il n’avait absolument pas abîmé le texte. Dans la mise en scène de mon fils, c’est également ce respect du texte de Pagnol qui prime
http://www.midilibre.fr/2011/06/29/raimu-etait-la-perfection,345894.php
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